Au lendemain des Lumières : La vision postlaïque de J. G. Hamann est un monument d’érudition contemporaine concernant le philosophe allemand du XVIIIe siècle Johann Georg Hamann, le père fondateur de ce qui est maintenant connu sous le nom d’orthodoxie radicale. Cette œuvre magistrale fait connaître pour la première fois au public français un luminaire du Siècle des Lumières, ami du philosophe Emmanuel Kant, mais oublié de la postérité. J. G. Hamann, appelé la bête noire des Lumières, a été le fondateur visionnaire du mouvement « métacritique » qui remet radicalement en question les principes fondamentaux de la raison laïque, soubassement de toute la civilisation occidentale moderne.
Le but de ce présent ouvrage est double. D’une part, il cherche à illuminer la vie et les écrits d’une figure notoirement obscure, Johann Georg Hamann (1730–1788), dont l’influence était vaste dans sa propre époque – il était même considéré avec révérence comme le « Mage du Nord » – mais qui n’est généralement connue aujourd’hui, le cas échéant, qu’indirectement, par association avec son protégé Johann Gottfried Herder (1744–1803), le courant Anti- Lumières et le mouvement littéraire connu sous le nom de Sturm und Drang. En bref, ce livre cherche à recouvrer une figure importante mais négligée – dans l’espoir également de corriger une idée erronée courante sur Hamann, savoir celle selon laquelle il aurait été un « irrationaliste, » voire (comme certains l’ont suggéré à tort) le fondateur de l’irrationalisme moderne. D’autre part, de manière plus constructive, cet ouvrage cherche à tirer les implications de l’interaction de Hamann avec ses amis et ses contemporains qui comprenaient certains des principaux esprits éclairés des Lumières allemandes, tels que Kant, Lessing et Mendelssohn. Plus spécifiquement, il cherche à montrer dans quelle mesure les arguments éclairés de Hamann à l’encontre des philosophes des Lumières – les Aufklärer – l’ont, en fait, emporté. En outre, dans la mesure où Hamann a prophétisé la fin des Lumières, anticipant ce que Frederick Beiser a appelé le « destin de la raison, » ce livre le présente comme une sorte de prophète postmoderne, c’est-à-dire quelqu’un qui était déjà, bien que de manière anachronique, en conversation avec la postmodernité. C’est en cela tout spécialement, sera-t-il défendu ici, que se trouve sa pertinence prophétique inouïe au-delà de son temps et touchant à notre propre époque.